Soleil noir
Je suis le ténébreux, — le veuf, — l'inconsolé, Le prince aquitain sans tour à pourpre abolie : Ma seule idole est morte, et mon luth constellé Porte un sec soleil noir, plein de Mélancolie ! En la nuit du tombeau, toi qui m'eus chamboulé, Rends-moi le Pausilippe et les champs d'Italie, La fleur qui plaisait tant à mon coeur esseulé, Et notre treille où pampre à nos roses s'allie. Fus-je un Amour, Phébus ? Lusignan ou Cesbron ? L'aède est rouge encor d'un baiser à la reine ; J'ai ronflé dans la grotte où reste une sirène. Vainqueur j'ai traversé dix fois par l'Achéron, Transposant tour à tour, sur la harpe d'Orphée, Les soupirs de la sainte et les cris de la fée.
Les mots en gras au milieu de chaque vers dessinent le soleil noir qui orne le bouclier du Desdichado.
© Gilles Esposito-Farèse – 2015