Isocèle
El Desdichado, par Gérard de Nerval (1808-1855)
Je suis le ténébreux, — le veuf, — l'inconsolé,
Grand prince en Aquitaine à l'enseigne abolie :
Mon seul astre m'a fui, — en mon luth constellé
Bouillonne un soleil froid plein de Mélancolie.
Dans la nuit des défunts, toi qui m'as consolé,
Rends-moi mon Pausilippe et les ports d'Italie,
La fleur qui plaisait tant à mon coeur esseulé,
Et la treille où le pampre à l'acanthe s'allie.
Suis-je Éros ou Phébus ?... Lusignan ou Biron ?
Ma joue est rouge encor du baiser de la reine ;
J'ai rêvé dans la grotte où flotte la sirène...
Et j'ai dix fois vainqueur traversé l'Achéron :
Chantant chacun leur tour sur la harpe d'Orphée
Les soupirs de la sainte et les cris de la fée.
Tous les vers comportent le même nombre de caractères. La ponctuation de l'original est respectée.
Nicolas Graner, 2000, Licence Art Libre