Thulé
Il était une fois un veuf inconsolé,
un prince de Thulé à la coupe polie.
Sa Dame lui légua ce vase constellé
où se boit le vin noir de la Mélancolie.
À deux pas du tombeau, le prince au cœur fêlé
vivait de souvenirs sur la mer d'Italie.
Lorsqu'il pensait à Elle, il la voyait brûler
dans la coupe où les pleurs au Spumante s'allient.
Il fit venir les pairs, les puissants, les barons.
Devant eux, comme un Grec au centre de l'arène,
il vida le calice et revit la sirène.
Puis il jeta le vase au cœur de l'Achéron.
Le flot noir engloutit le merveilleux trophée.
« Il ne but plus jamais », nous dit le coryphée.
Pastiche de la chanson du roi de Thulé, dans le Faust de Johann Wolfgang von Goethe (1749-1832), que traduisit Gérard de Nerval.
© Pascal Kaeser – 2001