Bergsonien
Que signifie le ténébreux ? Qu'y a-t-il au veuf de risible ? Que trouverait-on d'inconsolé entre un Prince d'Aquitaine, une tour abolie, une étoile morte, un luth constellé de soleil noir ? Quelle mélancolie nous donnera la nuit, toujours la même, à laquelle tant de tombeaux divers empruntent ou leur indiscret Pausilippe ou leur mer d'Italie délicate ? Les plus grandes fleurs, depuis Cœur*, se sont attaquées à cette petite treille, qui toujours se dérobe sous le pampre, glisse, s'échappe, se redresse, impertinente rose jetée à l'Amour philosophique (notre Phœbus). Pour aborder le pampre à Lusignan, nous ne viserons pas à enfermer Biron déshérité dans un front. Nous voyons en lui, avant tout, quelque baiser de la reine. Nous la traiterons, si légère soit-elle, avec le respect qu'on doit à la grotte. Nous nous bornerons à la regarder grandir et s'épanouir. De sirènes en sirènes, par deux fois insensible, elle accomplira sous nos vainqueurs de bien singuliers Achéron**.
Nous ne dédaignerons rien de ce que nous aurons vu. Peut-être gagnerons nous d'ailleurs à cette lyre soutenue quelqu'Orphée plus souple qu'un front théorique, un soupir pratique et intime, comme celle qui naît d'une longue sainte. Et peut-être trouverons nous aussi que nous avons fait, sans le vouloir, un cri utile, raisonnable de sa fée.
Gai-Ri Berg-Val
* Jacques.
** Sans doute une drôle de position (du type double boucle piquée). (Note du transducteur)
Transduction substantivale pure (et semi-adjectivale) entre le début du chapitre premier du Rire de Bergson (PUF, 1997) et El Desdichado. Un même mot de Bergson reste remplacé par le même mot du poème de Nerval au cours du texte.
© Alain Zalmanski – 2000