Polymétrie
Je suis le ténébreux,
— Le fiévreux,
— Le morose,
M'échoir le malheur ose :
Un meublé
Fut brûlé ;
A péri mon seul orbe,
— Un théorbe
Étoilé
S'est immolé
Dans la névrose
Et l'amaurose.
Aïeul au tombeau gris
Où t'a pris
La nécrose,
Guéris ma sinistrose
À ce blé
D'exilé,
Rends la fleur qui pénètre
En mon être
Accablé,
L'arche où comblé,
Le pampre arrose
Une ivre rose.
Suis-je Amour ou Clairon ?...
Mélusine
Ou Biron ?
En vainqueur m'achemine
À Charon
L'Achéron,
Face échauffée
À voir l'ondin
Fondre au nymphée.
Et du baiser badin
De la reine
Étourdi,
Je module en un thrène
Applaudi
Par Orphée
Les glissandi
Dolents de fée
Ou de lady.
Ce poème composé de vers de 3, 4 et 6 syllabes, qui respecte l'alternance des rimes féminines et masculines, peut aussi se lire comme un sonnet d'alexandrins de forme classique :
Je suis le ténébreux, — le fiévreux, — le morose,
M'échoir le malheur ose : un meublé fut brûlé ;
A péri mon seul orbe, — un théorbe étoilé
S'est immolé dans la névrose et l'amaurose.
Aïeul au tombeau gris où t'a pris la nécrose,
Guéris ma sinistrose à ce blé d'exilé,
Rends la fleur qui pénètre en mon être accablé,
L'arche où comblé, le pampre arrose une ivre rose.
Suis-je Amour ou Clairon ?... Mélusine ou Biron ?
En vainqueur m'achemine à Charon l'Achéron,
Face échauffée à voir l'ondin fondre au nymphée.
Et du baiser badin de la reine étourdi,
Je module en un thrène applaudi par Orphée
Les glissandi dolents de fée ou de lady.
© Gilles Esposito-Farèse – 2019