J'ai conseillé le Roi, la cour m'était servile
D'une volonté ferme on m'a vu régenter
Je pouvais d'un seul trait abolir une ville
Étais-je bête, alors, d'aller me tourmenter !
Pris d'un grain de folie je partis pour la guerre
Poussant toujours plus loin l'ennemi qui fuyait
Je conquis à moi seul la moitié de la Terre
Sur le champ de bataille, hélas, tout m'ennuyait
J'ai cherché la richesse et trouvé la fortune
En puisant sans pudeur dans le pot des deux mains
Chaque nouvelle somme à présent m'importune
Pas de traite, d'action ni de chèque demain !
J'ai beau jouir mille fois, baiser avec ivresse
Goûter la volupté qui brise un cœur d'airain
Dans les feux de la chair plus rien ne m'intéresse
Tout en couchant, je rêve un monde plus serein...
Une humble cour de ferme où l'on trait quelque bête
Un grain de blé poussant dans la terre d'un champ
La fortune du pot, un somme d'une traite
Le baiser de la brise et les feux du couchant
Nicolas Graner, septembre 2014, Licence Art Libre